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La réparation de vélos en plein essor
C'est un article paru dans le Monde daté 31 octobre- 1°- 2 novembre :
Alors que la pratique de la bicyclette explose, les ateliers, commerciaux ou associatifs, se multiplient.
Dans l’atelier associatif de réparation de bicyclettes La petite Rennes, à Rennes, le 20 octobre 2021. THIERRY PASQUET / SIGNATURES POUR «LE MONDE»
« Il était temps qu’on ouvre, car la demande explose. » A Rennes, David Piederriere, coprésident de l’atelier associatif de réparation de bicyclettes La Petite Rennes, se félicite d’avoir troqué, début septembre, un local exigu du centre-ville pour un espace de 160 mètres carrés dans l’écoquartier de la Courrouze, à l’emplacement d’une ancienne caserne.
Chaque jour, entre 30 et 40 personnes poussent la porte de l’atelier, « pour réparer leur vélo, acheter une pièce d’usure, prendre une information », poursuit le responsable. En échange d’une adhésion de 20 euros par an, les membres peuvent manier les outils mis à leur disposition et bénéficier des conseils des salariés. Si l’association insiste sur sa mission « solidaire » et sur son engagement à réemployer des objets plutôt que de les jeter, une bonne partie de ses membres ne sont pas des militants. En effet, à Rennes, la dizaine de boutiques de vélocistes ne suffit pas à absorber la demande, et les délais d’obtention d’un rendez-vous se comptent en semaines.
Le marché de la réparation de vélos a beaucoup changé en quelques années. Jusqu’au milieu des années 2010, pour remettre en état sa bicyclette, l’usager pouvait solliciter, outre les 300 ateliers associatifs existants, un vélociste de son quartier ou, à défaut, « un gentil voisin qui fait tout ».
Mise en relation de réparateurs et de citadins pressés
Puis, à Paris, Strasbourg, Bordeaux ou Lyon, des plates-formes ont lancé un service à domicile. La société Cyclofix, créée fin 2015, met en relation des réparateurs indépendants, autoentrepreneurs pour la plupart, et les citadins pressés. Aujourd’hui, la plate-forme centralise les emplois du temps de 200 mécaniciens, dans 14 agglomérations. Entre-temps, les enseignes de distribution se sont équipées d’ateliers de réparation, le plus souvent en fond de boutique ou au sous-sol.
La pandémie et la forte progression de l’usage du vélo ont chamboulé le marché. La pénurie à laquelle est confronté le secteur depuis plus d’un an a redoré le blason des vieux biclous retapés. Reprenant une idée de la Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB), l’Etat a financé, entre mai 2020 et mars 2021, une dotation de 50 euros pour chaque vélo remis en état. L’opération, qui consistait à « sortir des caves » les bicyclettes qui firent un jour office de cadeau de Noël et rouillaient depuis, a fait chauffer les outils dans les ateliers. Enfin, parmi les nouveaux cyclistes, nombreux sont ceux qui avouent sans honte ne pas savoir changer une chambre à air ni remplacer un patin de frein.
C’est pour capter ce marché que Vélogik, une entreprise spécialisée dans la maintenance cyclable pour le compte d’entreprises ou de collectivités, s’adresse désormais au grand public. La société, qui emploie 150 personnes et affiche un chiffre d’affaires de 9 millions d’euros, a ouvert cet automne deux ateliers à Grenoble et Paris.
Pénurie de pièces détachées neuves
Dans l’Est parisien, l’entreprise a investi une ancienne cristallerie aux larges baies vitrées à travers lesquelles les passants aperçoivent deux mécaniciens en train de manier des vélos suspendus à des pieds d’atelier. « Nous tenons à rendre visible ce savoir-faire pour le mettre en valeur », explique Chloé Bouilloux, chargée d’animer le réseau d’ateliers. D’ici à la fin 2022, Vélogik compte « mailler les dix plus grandes agglomérations cyclables de France, en succursales ou en franchises », développe Vincent Monatte, son directeur général.
Le secteur subit toutefois la pénurie de pièces détachées neuves qui, pour la plupart, viennent d’Asie. Vélogik et Cyclofix disposent certes d’un avantage concurrentiel, en commandant et stockant des pièces en grande quantité. Mais cela ne suffit plus. Les vélocistes commencent à lorgner le stock constitué au fil des années par les ateliers associatifs. « Cela fait sept ans que nous désossons des vélos pour réemployer ce qui peut l’être », souligne David Piederriere, à La petite Rennes. Cette méthode inspire désormais l’ensemble du secteur. « Lorsqu’un vélo en libre-service que nous exploitons doit être mis au rebut et qu’il comporte des pièces quasi neuves, nous les récupérons », indique M. Monatte.
Tous les acteurs peinent en outre à recruter
Tous les acteurs peinent en outre à recruter. L’Institut national du cycle et du motocycle (INCM), qui délivre des formations spécialisées, estime à 8 000 le nombre de mécaniciens en exercice. « Il en faudrait au moins 10 000, peut-être 14 000 d’ici cinq ans, mais surtout des mécaniciens correctement formés », estime Jean Le Naour, directeur de l’INCM.
En matière de formation, chacun fait avec les moyens du bord. La FUB « pilote une formation d’opérateur cycle qui s’acquiert en une vingtaine de jours », indique Claire Toubal, chargée de mission. 422 personnes en avaient bénéficié à la mi-octobre. Vélogik a créé en interne son propre organisme, qui a formé une centaine de collaborateurs. En trente-cinq heures, dispensées en ligne, la « Cyclofix Academy » promet pour sa part un « apprentissage en autonomie, validé par des vidéos, qui est en cours de certification », précise Alexis Zerbib, fondateur de l’entreprise. Les recruteurs ne font pas la fine bouche. « Il suffit de révéler sur le réseau professionnel LinkedIn que l’on commence une formation de mécanicien vélo pour recevoir des promesses d’embauche », confie un responsable de l’industrie du cycle.
Tags : Presse, Economie
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